Pourquoi apprendre quand Google sait ?
La mémoire collective court-circuitée par Google, c’est un vrai sujet de société sujet à débat. Mais comme Laurent-Pierre, qui animait le débat à l’IJBA, l’a si bien souligné, il semblerait presque qu’il y ait un consensus et pas de réelles polémiques. Pourtant. Les risques soulignés par les deux intervenants méritent d’être pris en compte. Sans catastrophisme.
- Le risque d’uniformisation d’abord.
Google, Wikipedia, la même information pour tous ? L’uniformisation viendrait surtout du fait d’avoir un seul outil qui présente à tous le « même » contenu. Je mets « même » entre guillemets parce que les Chinois, ou d’autres pays n’ont pas forcément la « même » info que celle diffusée en France.
- Le risque de « perdre en profondeur »
Depusi que nous sommes Googuelisés, nous éprouverions une difficulté à ne faire qu’une seule activité cérébrale (du genre lire la Comédie Humaine), l’esprit devient plus rétif et a du mal à se concentrer en profondeur : sensation de tout survoler en surface alors qu’auparavant , on plongeait plus en profondeur. C’est vrai que l’on a parfois le vertige à essayer de tout engranger quand l’information à l’ère numérique fuse de partout, que cela demande une capacité toujours plus importante à synthétiser vite… pourtant, chez moi, le livre-papier avec son obligation de concentration, reste à une échappatoire de la pensée pour se reposer loin de ce « chaos ».
- La difficile acquisition des méthodologies et le rôle du formateur
Bien entendu, avec Google, le référencement des sites ne se faisant pas sur un critère de pertinence, il est indispensable pour les plus jeunes d’apprendre à distinguer le bon grain de l’ivraie. Les enfants surfent et prennent au premier degré et pour argent comptant ce qui est écrit : il y a un réel manque de corrélation avec d’autres sources. Puis, il y a aussi que, persuadés d’avoir leur libre-arbitre, ils croient en savoir autant que leurs profs.
Mais de fait, l’enseignement n’est-il pas à la traîne ? Laurent-Pierre souligne qu’un étudiant aura à réapprendre en fin de cursus la moitié de ce qu’il a appris pendant son cursus. Mais au-delà de ce point, je suis toujours effrayée de voir mes stagiaires (de 16 à 25 ans) utiliser Google sans aucun esprit critique (c’est vrai puisque c’est marqué dans Google) pour une capitale, une conjugaison, une actualité sans vérification. Ils ne sont pas les seuls. Pensez à toutes ces fausses infos et chaines de l’amitié que l’on reçoit sans se demander de quand cela date, d’où cela vient et si c’est « vrai ».
Sur Internet, il faut se souvenir de façon « préférentielle de l’info qui revient le plus souvent », c’est vrai, c’est un moyen de ne pas se noyer dans l’information. Mais la désinformation sur le net peut aussi prendre des proportions importantes.
La mémoire collective aujourd’hui, c’est aussi cet apprentissage de méthodologies pour mieux analyser ce que Google sait à notre place. Ah et puis reste que là où on ne retient plus quelque chose, on retient autre chose (on oublie les numéros de téléphone mais pas comment se servir de son Iphone…)